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TENNIS FEMININ - ACTUS

14 janvier 2013

OA 1ère journée : les favorites au rendez-vous

Pas de surprises lors de cette première journée à l'Open d'Australie 2013. Les membres du Top 10, Li, Stosur, Radwanska, Kerber et Sharapova sont passées sans fioritures : deux sets expéditifs pour chacune d'entre elles.

Et la palme revient à la numéro 2 mondiale, Sharapova, qui n'a laissé aucun jeu à sa compatriote Olga Puchkova. Par ailleurs, mention spéciale à Stosur qui a ouvert son compteur de victoires après un début de saison manqué. L'Australienne a su gérer la pression devant son public et va tenter de prendre sa revanche au second tour contre Jie Zheng. Cette dernière l'avait battue d'entre de jeu, il y a 10 jours, à Sydney.

Victoires également des ex-numéro 1 mondiales, Jelena Jankovic, Ana Ivanovic et Venus Williams. L'Américaine signe là un retour gagnant à l'Open d'Australie après avoir manqué le tournoi l'an dernier, dû à son syndrôme de fatigue. Elle affrontera au tour suivant Alizé Cornet, la deuxième joueuse française, qui a cravaché près de 3h30' sur le court face à Erakovic. Cornet a servi quatre fois pour le match dans la dernière manche mais la Néo-Zélandaise a su faire preuve d'aplomb pour contrer la fougue de la tricolore. On parlera ici d'une victoire au mental.

Cornet a été rejointe par ses compatriotes Bartoli et Foretz Gacon, victorieuses respectivement de Medina Garrigues et Giorgi. Il s'agit de deux victoires maîtrisées de bout en bout et gérées grâce à leur expérience. Bartoli retrouvera au deuxième tour la Serbe Dolonc (ex-Manasieva) contre laquelle elle avait joué et perdu (à cause d'une blessure) au même stade de la compétition en 2011.

A noter, les victoires des têtes de série, Cirstea, Goerges, Paszek, Makarova, Cibulkova et Zakopalova.

Demain, entrée en lice de la numéro un, Victoria Azarenka, et de la grande favorite de l'épreuve, Serena Williams.

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10 janvier 2013

OPEN D'AUSTRALIE 2013, TABLEAU FEMININ : LES FORCES EN PRESENCE

Passage en revue des favorites du prochain Open d'Australie qui débute lundi 14 janvier.

La grande favorite de cette prochaine édition est incontestablement Serena Williams. L'Américaine a remporté les deux derniers Grand Chelem (Wimbledon et US Open 2012) ainsi que l'un des premiers tournois de l'année (Brisbane), sans perdre un set. Depuis le début de sa collaboration avec Patrick Mouratoglou en juin 2012, elle n'a d'ailleurs perdu qu'un seul match contre Angelique Kerber à Cincinatti. A part grosse contre-performance, Williams est en pôle position pour devenir n°1 mondial après ce premier Grand Chelem de l'année. Elle a en effet beaucoup moins de points à défendre que ses deux devancières au classement, Victoria Azarenka et Maria Sharapova.

Celles-ci sont d'ailleurs les outsiders les plus sérieuses de l'Américaine. Azarenka reste sur une demi-finale à Brisbane, non jouée à cause d'un problème d'ongle à un orteil, mais a fait une rentrée convaincante avec des matches autoritaires. La plus grande inconnue est sa propension à défendre pour la première fois un Grand Chelem. Deux cas de figure s'annoncent : soit elle craquera sous la pression des médias et l'attente du public et se fera sèchement éliminée dans les premiers tours, soit elle fera respecter son rang et atteindra au moins une demi-finale. Si elle croise la route de la cadette des Williams, elle n'aura pas l'ascendant psychologique, bien au contraire. Williams mène 11-1 dans leurs confrontations directes. Maria Sharapova est capable du meilleur comme du pire, bien qu'elles nous ait réhabitué au meilleur ces derniers temps. N'ayant joué aucun match encore en 2013, la voir remporter le titre serait une surprise. Mais elle a de l'expérience à faire valoir, a déjà gagné l'Open d'Australie et est une compétitrice hors pair.

Agnieszka Radwanska arrive avec un titre en poche à Auckland et une bonne semaine à Sydney. Si elle n'est pas à bout de force après ses deux premières semaines riches, elle aura beaucoup de confiance pour aller loin dans le tournoi. Cependant, son éternel manque de puissance laisse toujours penser qu'elle n'ira pas au bout (à l'instar de Martina Hingis au début des années 2000 avec l'avénement des soeurs Williams). Na Li, qui a l'habitude de bien commencer ses saisons, devrait réussir un bel Open d'Australie. Victorieuse, chez elle, à Shenzhen, et auteure d'un beau parcours à Sydney, la protégée de Carlos Rodriguez sait dominer l'échange. A bientôt 31 ans, ce Grand Chelem est peut-être l'un des derniers qu'elle peut remporter. Angelique Kerber et Sara Errani vont devoir confirmer l'année 2012 qui les a vu exploser au plus haut niveau. Kerber apporte plus de garanties physiques et mentales que l'Italienne. Cette dernière enchaîne les doubles avec Vinci et ne peut pas continuer sur ce rythme très longtemps.

Petra Kvitova semble hors du coup. Défaites sèches et prématurées lors des deux précédentes sorties, elle défend sa demi-finale de l'an dernier. Il ne serait pas étonnant de la voir trébucher cette saison, à la manière de Zvonareva en 2012 qui a multiplié les forfaits à cause de virus et autres blessures. Samantha Stosur fait un blocage mental chez elle, en Australie. C'est un secret de Polichinelle. Brisbane et Sydney ont été de véritables échecs pour l'Australienne qui veut tellement bien faire devant son public. Si elle hérite d'un tableau clément, la confiance accumulée peut la porter très loin. Le déblocage est-il pour cette année ? Pas si sûr... Caroline Wozniacki était numéro un mondiale à la même heure l'an dernier. Depuis elle a véritablement dégringolé. Manque de puissance, de coups d'attaque, défense moins efficace, la stabilité du jeu de la Danoise semble être désormais beaucoup plus fragile (malgré sa fin d'année 2012 positive). Elle est tout de même capable de surprendre à nouveau. La Française Marion Bartoli a de l'ambition et ne cesse de répéter qu'elle veut remporter un titre du Grand Chelem. Il lui faut beaucoup d'éléments favorables pour aller loin. A commencer par un bon tableau, peu d'énergie perdue sur les premiers tours, un plan B si elle se retrouve dans une situation compromise, un service au rendez-vous. Mais son envie et sa détermination peuvent faire basculer de nombreux matches. Si elle fait un meilleur parcours que Wozniacki, elle réintègrera le Top 10.

Cibulkova (Sydney), Keys (Sydney), Stephens (Brisbane et Hobart), Kuznetsova (Sydney), Pavlyuchenkova (Brisbane), Zakopalova (Shenzhen) ont toutes impressionné à leur échelle en ce début de saison et sont capables sur un Grand Chelem d'aller loin. L'attente des médias se situe davantage sur les Britanniques, Robson et Watson, des Allemandes, Goerges, Lisicki, Barthel et Beck, de la joueuse croate de 16 ans, Vekic, et de la Française ex-numéro un mondiale junior, Mladenovic. L'une de ces tenniswomen peut-elle créer la surprise et atteindre le Graal ? Réponse dans une quinzaine de jours...

22 novembre 2012

DES OASIS VERTS AU MILIEU DES BUILDINGS

Il y a un siècle, des vaches passaient aux abords de la rue Sherbrooke, le parc Lafontaine était la ferme Lafontaine. Aujourd'hui, l'agriculture peut-elle renaître entre les pavés ?

« Le concept des jardins autonomes prend de plus en plus d'ampleur à Montréal. Tout espace est prétexte au développement de l'agriculture urbaine, qu'il s'agisse des toits, des terrasses institutionnelles, des ruelles ou des cours d'écoles. Les projets de production alimentaire et de verdissement de la ville de Montréal fleurissent dans un contexte de dégradation environnementale et de mal bouffe, où les citoyens sont en mal de nature. », affirme Gaëlle Janvier, la chargée de projet d'Alternatives, une organisation de développement international basée dans la métropole québécoise. Un moyen d'obtenir des aliments frais et de réduire notre empreinte écologique. Une manière de revenir aux besoins primaires de l'être humain.
« 
Nous travaillons sur bon nombre de projets actuellement. », raconte-t-elle. La jeune femme ajoute, « Nous sommes des consultants en montage de projet. Nous assistons les communautés qui veulent monter les jardins. On les encourage à apprendre ce qu'il y a de plus facile à développer. L'idée est vraiment de se réapproprier l'espace. » L'organisation a des partenariats divers et variés, des écoles aux centres pour personnes âgées en passant par les associations de voisinage. Le fruit de tout cela, ce sont des jardins collectifs, comptant un animateur-jardinier qui coordonne les activités et initie les nouveaux participants.

À la reconquête des espaces verts
Le Collectif de recherche en aménagement paysager et agriculture urbaine durable (CRAPAUD) est un des partenaires d'Alternatives. Il intervient à l'UQ
ÀM, dans la cour intérieure du complexe des sciences, près du pavillon Président Kennedy. Là, nous retrouvons notamment des plantes médicinales. Lorsque l'on approche son nez, les exhalaisons qui se dégagent ouvrent l'appétit. En réalité, ces odeurs agréables ne sont pas sans rappeler les soupes d'hiver aromatisées de condiments parfumés. Le nom de chaque plante est inscrit sur de petits écriteaux en acier, tenus par des fils de fer. Ainsi, pensées sauvages, valériane, bardane, orties, dessinent le petit jardin au milieu des plus traditionnelles lavandes et menthe.
Un couple de connaisseurs s'arrête. Ils passent la main dans les feuillages. Ils essaient de deviner à quelle plante correspond la senteur. « 
Nous aimons venir ici. C'est agréable d'avoir accès à ce petit coin vert au milieu de la ville. Cela serait bien qu'il y en ait plus. » Une autre habituée des lieux, la soixantaine, vient enlever quelques feuilles d'automne tombées sur les arbustes. « J'aime le rapport à la terre et sentir les plantes. C'est très rafraîchissant et cela nous change des odeurs des pots d'échappement ! » lance-t-elle d'un ton ironique. En face des plantes médicinales, se situe un rectangle dédié au compost.

Des techniques astucieuses
Outre l'accompagnement aux communautés, Alternatives a fait de nombreuses expérimentations horticoles. « 
Nous avons développé des techniques, comme les bacs, construits à base de matériaux récupérés, et qui permettent la culture hors sol. Le but de ces procédés est d'occuper les espaces contaminés qui ne permettaient pas la culture auparavant. », explique Gaëlle Janvier. Les bacs à réserve d'eau permettent une autonomie de trois jours et la récupération des eaux de pluies. Autre atout du concept, le potentiel éducationnel pour les plus jeunes. Les petits citadins qui n'ont pas été habitués à voir pousser des aubergines ou des tomates ont l'opportunité de l'observer.
Avec l'arrivée de l'automne, le jardin sur le toit du pavillon de Burnside à l'Université McGill vient d'être démonté pour mieux revenir en avril prochain, aux beaux jours. Certaines plantes qui ne souffrent pas de la rudesse de l'hiver ont été replantées aux abords du grand bâtiment. Caca d'oie, tilleul, avocat, les teintes de vert des arbustes se mélangent, comme sur la palette d'un peintre. Des enfants curieux viennent voir à quoi ressemble des feuilles d'estragon français ou de sauge. Un bénévole déclare, « 
Je m'implique au jardin pour rencontrer des personnes qui ont les mêmes valeurs sociales que moi. À mon avis, c'est une activité très zen où il ne faut pas être performant à tout prix. » Au Printemps, les plantes potagères, tropicales et médicinales reprendront leur place sur différentes terrasses de la ville. Il faut dire que ces lieux de pousse incongrus sont parfois les seules options dans un environnement urbain saturé.

Encore du travail à accomplir
La chargée de projet d'Alternatives a un regret, le fait que la mairie ne s'implique pas dans l'agriculture urbaine. « 
Ils ne s'investissent pas. Ils n'en ont rien à faire. Nous avons lancé une consultation publique pour forcer la municipalité à s'y intéresser. Dans son plan de développement durable, il n'y a qu'une phrase sur l'agriculture. C'est ridicule pour une ville qui est reconnue internationalement pour la qualité de ses projets dans l'agriculture urbaine. » Parce que la construction de sociétés durables semble légitimement passer par cette notion.

Une implantation à l'échelle globale
Les jardins collectifs peuvent rappeler les jardins partagés, ces parcelles que les villes mettent à disposition des familles. Une notion fort développée en Europe notamment, avec les fameux
allotment en Grande-Bretagne ou les jardins ouvriers sur le Vieux Continent. Les jardins collectifs s'en distinguent cependant, puisqu'ils sont gérés par des ONG et les récoltes sont distribuées collectivement. Qu'il s'agisse d'Alternatives ou de tout autre organisation, l'idée est de stimuler le développement et que chaque technique soit transposable du Nord au Sud.
Aux États-Unis, la ville de Détroit, ancienne capitale mondiale de l'industrie automobile, qui a connu la crise, la fermeture des usines, l'exode de ses populations, et le délabrement des habitations, est en train de renaître grâce à l'agriculture urbaine. Cette dernière contribue à l'intégration des immigrants afro-américains et participe à la production de tonnes de produits frais et sains. Un exemple qui pourrait servir de modèle aux politiques des plus grandes villes mondiales.

JQM

15 octobre 2012

ENTRE MOMENTS DE DOUTE ET RAGE DE VAINCRE

Gaétan Boucher, éternel double champion des JO de Sarajevo en 1984, la fierté de tout un peuple... Le patineur de vitesse québécois est aussi un homme comme tout le monde, marié et père de quatre enfants. Avec, durant toutes ces années, un leitmotiv : la volonté de toujours donner le meilleur de soi dans ses projets.

18 février 1988. Jeux Olympiques de Calgary. Gaétan Boucher est acclamé par le public canadien. Il vient là de signer son dernier 1000 mètres dans un grand championnat, chez lui. La cinquième place importe peu. Après deux années gâchées par une vieille blessure datant de 1983, le natif de Charlesbourg le sait, sa retraite approche. Usé par ces courses contre la montre, par ces soins interminables pour soigner une cheville récalcitrante, l'envie s'est envolée. Il est temps de passer à autre chose. « J'avais 29 ans à l'époque. Maintenant, on raccroche un peu plus tard parce que les gens sont plus impliqués et font beaucoup d'argent, ce qui n'était pas mon cas dans le temps. », raconte l'ancien patineur aux cheveux grisonnants.

De multiples opportunités
La reconversion ? Jamais chose simple pour un athlète de haut niveau. Là où les gestes techniques étaient devenus naturels, fluides, souvent parfaits... les automatismes liés à une nouvelle profession sont plus difficiles à appréhender. Mentalement, passer de l'euphorie des Jeux Olympiques à un quotidien bien plus ordinaire laisse des séquelles. « 
Je dirais que j'ai vécu une mini dépression qui s'est étirée sur une dizaine d'années. On cherche ce qu'on pourrait bien faire. J'ai travaillé dans le marketing pour une entreprise de produits laitiers pendant deux ans. Je me suis aperçu que je n'aimais pas ça, alors j'ai arrêté... »

Et puis, comme dans toute vie, la roue tourne. Gaétan Boucher est contacté par le fabricant d'équipement de hockey Nike Bauer. On lui propose un poste de développeur de produit. Il accepte sans hésiter. Là-bas, il va s'occuper d'objets, du concept à la production. « À partir de là, ç'a été plus facile. J'y suis resté 15 ans. » Être champion olympique ouvre des portes, facilite les choses. « Je suis aussi descripteur aux JO tous les quatre ans. On me l'a proposé parce que j'ai un bon nom. »

Le quadruple médaillé olympique ne patine plus, car il n'y a pas de longue piste au Québec. Alors il pratique le golf, sa nouvelle passion, pendant son temps libre, et s'essaie au vélo avec son épouse d'origine allemande, elle-même ancienne patineuse de haut niveau. Depuis le 1er octobre, il travaille à l'Arena de Rosemère. Il est désormais directeur général de la Corporation de développement culturel et sportif de la ville de la banlieue montréalaise (CDCSR). Il ne s'est pas encore approprié son bureau. Les tableaux, babioles et autres photographies de Fernand Proulx, son prédécesseur en semi-retraite, décorent la pièce. Assis devant son ordinateur, le débutant ne semble pas tout à fait à l'aise dans ce nouveau rôle, notamment lorsqu'il répond au téléphone. « Je remplace M. Proulx. Je m'appelle Gaétan Boucher, je suis le nouveau directeur général... », dit-il d'une voix peu assurée. L'inscription « Rosemère » qui apparaît sur sa chemise blanche au niveau du cœur vient en toute symbolique renforcer son attachement à la commune. « Ici, c'est ma ville. J'y vis depuis 22 ans avec ma femme et mes quatre enfants. C'est vraiment un bonheur d'être établi dans ce coin. » Rosemère, où il avait fondé un club de patinage de vitesse, où ses quatre enfants ont pratiqué le sport de leur père, avant de le délaisser pour le hockey. « Ma femme et moi avons la même mentalité sportive. On voulait que nos enfants fassent au moins un sport. Ils ont essayé le patinage mais ont préféré le hockey. Mon fils aîné est semi-professionnel dans la ligue américaine. », explique-t-il l'œil pétillant.

Contre les esprits étroits
L'anecdote le renvoie à son père, Cyrenus Boucher, féru de hockey. C'est grâce à lui, de façon indirecte, que Gaétan Boucher va se mettre au patinage de vitesse. Un scénario à la Walt Disney. Nous sommes en 1968, Gaétan a 10 ans. Il est fluet, timide. Son père le pousse à jouer à son sport de prédilection, comme ses grands frères, comme tous les québécois de son âge. Parce que faire du hockey, c'est normal. Mais l'enfant n'apprécie pas ce sport. « 
Il était déçu parce qu'il était le pire patineur de l'équipe. Alors il a arrêté et pris des leçons de patinage. », a raconté Cyrenus plus tard. À l'école, le garçon reçoit un dépliant qui fait la promotion du patinage de vitesse. Dans sa tête, cela fait tilt : « Je vais essayer ». Il ne connaît pas encore la discipline mais il est impatient de la découvrir. Son père ne semble pas s'intéresser à cet engouement soudain. Le gamin se rend à la patinoire chaque semaine, seul. Il glisse, se dépense, s'amuse. Et il gagne toutes ses courses. Un jour, le voisin des Boucher emmène son fils au club de patinage et voit Gaétan tout remporter. Il le dit à M. Boucher qui s'en étonne. Dorénavant, le paternel viendra assister aux entraînements de son cadet et deviendra son plus fervent supporter. La pratique de ce sport peu conventionnel au pays du hockey met en marge le petit. « On patinait avec des collants dans ce temps là... Je n'en ai pas souffert, mais le cercle d'amis se réduit naturellement aux gens qui ont les mêmes intérêts.... »

La machine est lancée. L'enfant devient adolescent, participe aux championnats nationaux, en ressort vainqueur. Il aiguise sa combativité. Un entraineur de l'époque déclare « Gaétan, c'est comme un petit agneau qui se transforme en lion ». Puis il s'expatrie en Europe parce qu'il n'y a pas d'infrastructures au Canada. Le patinage de vitesse, discipline née au XIIIè siècle aux Pays-Bas, est en plein développement. On ne gagne pas sa vie avec. Au mieux, on obtient une subvention de l'État après une éventuelle performance. Ce qui arrive à Gaétan Boucher après sa médaille d'argent aux Jeux Olympiques de Lake Placid en 1980. Le jeune homme choisit alors de poursuivre en parallèle des études de marketing et d'éducation physique.

En 1983, il se blesse à la cheville gauche après une chute. « Je suis tombé en fin d'une courte piste. Ça aurait pu ruiner mes chances pour Sarajevo. Mais j'ai eu une opération et avec la thérapie et tous les exercices, j'ai quand même réussi à revenir et à être en forme pour les JO. Sauf que les ligaments étaient touchés et il fallait leur donner le temps de guérir. Le fait d'avoir patiné si tôt après l'opération a mis un stress sur les ligaments. Il aurait fallu que je continue la thérapie mais je ne le savais pas... » Le champion à la taille moyenne ne revient pas à son meilleur niveau. Mais il garde l'espoir de revenir et travaille d'arrache-pied pour Calgary. À ce moment-là son père confie : « Gaétan y sera, croyez-moi. Il adore patiner. C'est presque une maladie. » La suite, on la connaît.

Une exposition médiatique contrôlée
À l'entente de son nom, les Québécois s'interrogent. « 
Que devient-il ? On ne le voit plus à la télévision... Je me demande ce que fait Gaétan Boucher. » Le patineur se fait de moins en moins présent dans les médias. Par choix, malgré les sollicitations. « Je refuse beaucoup de choses. », telle cette télé-réalité mettant en scène des personnalités dans un concours de cirque... Pas en adéquation avec le caractère réservé, presque pudique, de l'ex-athlète. « Il y a trois, quatre ans, j'ai décidé de couper. Pas les contrats de publicité parce que ça paye, mais j'ai arrêté les sorties publiques, les galas. J'étais tanné. Moins on en fait, moins on est visible et donc moins on nous invite. Et j'en suis bien content... » Il ajoute, « Je n'ai pas fait du sport pour la médiatisation. »

Cela n'empêche pas le sportif de s'exprimer quand il estime la cause essentielle. Comme récemment à propos des candidatures canadiennes aux Jeux Olympiques : « Ça ne sert à rien de se présenter si on sait qu'on ne va pas gagner. Il faut d'abord créer les infrastructures. » Quoi qu'il en soit, le patineur reste un monument dans la mémoire collective. L'anneau de glace à Québec, un centre sportif et une rue à Saint-Hubert qui portent son nom, en sont l'exemple même. Un fait assez rare pour le signaler.

JQM

30 septembre 2012

LES RÉSEAUX SOCIAUX ONT-ILS LEUR PLACE À L'ÉCOLE ?

Intégrer Facebook ou Twitter dans son enseignement, une nécessité ! Tel est l'avis de François Guité, professeur d'anglais dans un Programme d'éducation internationale à Québec. L'enseignant chercheur a tenu hier une conférence sur la génération Internet et les médias sociaux à Chicoutimi. Ses collègues ont pu assister à la conférence, retransmise sur le web dans de nombreux Cégeps.

François Guité a récemment commencé à réfléchir sur la question de l'utilisation des réseaux sociaux à des fins d'apprentissage. En 2010, il reprend l'enseignement après deux années de pause. Et ce lapse de temps a été comme une révélation. « J'ai remarqué qu'en deux ans, la part de mes élèves qui avait Facebook était passée de 20 à 95 %. Juste après être sortis de classe, j'ai constaté qu'ils socialisaient, que cela était hyper important pour eux. », admet-il. Le professeur a aussi noté que les jeunes préfèrent utiliser les outils qu'ils connaissent plutôt que ceux qui sont fournis par les écoles, parce qu'ils ont eu le loisir de se les approprier, de les personnaliser. L'idée d'intégrer les réseaux sociaux dans son enseignement a alors trotté dans sa tête. « Aujourd'hui, l'apprentissage est social. C'est en interagissant que les jeunes réfléchissent, débattent. Les individus sont différents. Il faut adapter les pratiques selon ces différences. », ajoute-t-il. Un exemple concret de l'avantage de ces nouvelles technologies ? Il y a quelques mois, un élève écrit sur son compte Twitter « Je google mes mots pour les corriger au lieu d'utiliser un dictionnaire. » L'information se propage instantanément vers ses camarades de classe.

Selon François Guité, le problème actuel de l'enseignement vient du modèle traditionnel de l'école qui n'a pas beaucoup évolué comparé au contexte social. « Je ne comprends pas qu'on ne mette pas à profit l'expertise des élèves dans les médias sociaux pour qu'ils intègrent de nouveaux savoirs. » Avant, le savoir résidait dans les livres, ce qui obligeait les cours à se tenir en classe. Ce n'est plus le cas avec Internet : « Les jeunes ont besoin de stimulation. Je ne peux pas autant les stimuler qu'un écran. »
Le professeur a alors avancé le concept de l'instruction inversée. Il s'agit-là de permettre à l'élève d'aller chercher sur le web des informations sur le prochain cours et d'en discuter après. Ce qui en fait un élève beaucoup plus actif.
Pour l'anecdote, François Guité a souligné que les jeunes qui utilisent les médias sociaux ont de meilleurs résultats que ceux qui y sont réfractaires. Un simple hasard ?

Certains de ses confrères sont restés perplexes quant à son exposé. D'autres ont été convaincus de continuer dans cette voie, comme cette professeur d'anglais au Cegep du Vieux Montréal : « Cette conférence m'a conforté dans mes choix pédagogiques. J'utilise déjà les cellulaires des élèves. En fait, ils peuvent envoyer en cours des textos en anglais qui s'affichent au tableau. Puis, nous les corrigeons grammaticalement ensemble. »

François Guité s'est depuis peu associé avec des collègues afin de former un consortium. Le groupement s'intéresse à l'amélioration des pratiques pour les enseignants et conseillers pédagogiques. Chaque année, il finance cinq à six projets et organise des colloques de discussion.

JQM

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29 septembre 2012

UN SITE D'EXCEPTION À PROTÉGER

La ferme Hurtubise est l'une des plus anciennes maisons rurales de l'île de Montréal. Nichée sur l'idyllique chemin de la Côte-Saint-Antoine, elle offre aux visiteurs une histoire riche et fait la fierté des habitants de Westmount. Un témoignage du passé à préserver à tout prix.

Sitôt sorti de la station de métro Vendôme, les premiers pas sont révélateurs : la petite ville anglophone de Westmount est tout ce qu'il y a de plus bourgeois. De ses grosses bâtisses à ses rues en apparence parfaites, de ses boutiques au prix exhorbitants au style de ses habitants : des femmes à l'allure guindée, lunettes de soleil Ray-Ban sur le nez, chiens toilettés en laisse. Le décor est planté. Un peu plus loin, en haut de la rue Victoria, la maison Hurtubise se dévoile, interpelle. Elle est là, paisible, comme endormie. Elle tranche avec le style victorien des villas voisines. Ce n'est pas la plus imposante demeure du coin, peut-être pas la plus belle, mais certainement celle qui a le plus d'histoire. Un passé long de plus de 300 ans.

Un monument historique
La propriété, composée de deux unités, mesure 11 mètres sur 10,4 mètres.
À gauche, la maison originelle de 1739 avec ses quatres fenêtres sur le toit. Du côté droit, l'annexe en brique bordeau, rajoutée en 1870, et qui accueille des locataires, encore maintenant. Le vélo dans la véranda ainsi que le barbecue du jardin en témoignent.
Le style correspond à celui de la maison française du XVIIIè siècle, en pierre, avec un toit incliné et deux cheminées. Le terrain est assez vaste. Quelques endroits sont visiblement entretenus. D'autres pas, comme le côté droit du jardin, abandonné. Des branches d'érables cassées sont à terre. Les fougères et mauvaises herbes ont poussé. Quant aux toiles d'araignées, elles viennent décorer la cloture en bois. Seuls les écureuils perturbent le caractère silencieux de la scène.
La plupart des gens qui font leur jogging ne prêtent pas attention à la maison de ferme Hurtubise. Et pourtant, ils passent près d'un monument classé historique en 2004. Marie-Paule, elle, en a conscience. Cette mamie dynamique aime à contempler l'édifice. « 
Depuis dix ans que j'habite dans le Westmount, je ne m'en lasse pas. Je trouve cette habitation tellement charmante et authentique. Quand je la regarde, j'imagine des scènes de la vie qui y ont pu s'y produire... » Selon la vieille dame, qui a eu le privilège de visiter les lieux il y a quelques années, du mobilier d'origine est encore présent dans l'habitation. Elle ajoute, « Si j'ai bonne mémoire, la maison compte 4 niveaux : un sous sol, un rez de chaussée et deux étages. » Le sous-sol permettait notamment de conserver la nourriture alors que la famille venait s'y cacher en cas d'attaques amérindiennes.
Marie-Paule aura l'occasion de redécouvrir cette propriété si particulière lors de la 21è Opération patrimoine architectural de Montréal (Opam) du 23 septembre au 9 octobre. Des visites gratuites de 30 minutes y seront organisées.

Un héritage familial
Tenant son nom de son propriétaire, Jean Hurtubise, la maison de ferme est bâtie par le maçon Jacques Bertrand alors que Montréal n'en est qu'à ses balbutiements. La grandeur du bâtiment laisse présager que les Hurtubise sont aisés. La date de construction de la plus ancienne partie porte à confusion. Les ouvrages d'histoire sont discordants mais une étude récente dévoile qu'il s'agirait bien de l'an 1739.
L'implantation de la ferme n'est pas anodine : il s'agit du flanc sud-ouest du mont Royal, soit à l'extrémité ouest des terres abandonnées de la mission de la Montagne. L'espace original est bien plus important que celui d'aujourd'hui. Le père de Jean Hurtubise, Louis, cultivateur, se voit donner le terrain par les prêtres Sulpiciens à la toute fin du XVIIè siècle. L'époque où les premiers colons européens débarquent au pays de l'érable.
L'agriculture, principale source de revenus, constitue l'activité de la famille Hurtubise. Pommes, cerises et pruneaux bénéficient d'un ensoleillement particulier sur le coteau. Les fruits sont vendus sur les marchés. Des granges et autres dépendances composent le site. Ce n'est qu'en 1880 que toute cultivation est cessée face à l'expansion de la ville résidentielle de Westmount. D
ans la foulée, une grande remise en bois est construite au fond du jardin. Celle-ci accueille les premiers véhicules à moteur. Ce sont au total huit générations qui vont se succéder jusqu'en 1956, date de vente de la maison.

Un patrimoine à conserver
La ferme Hurtubise est un temps menacée de démolition. Elle est finalement sauvée par des racheteurs. Ils créent l'organisme non lucratif Héritage canadien du Québec auquel ils cèdent les droits en 1961. L'organisme veille à préserver les constructions québécoises de valeur. « 
Nous souhaitons que ce monument soit préservé et qu'il soit un élément pédagogique pour les futures générations. C'est un témoin du début de la colonisation ici au Québec. » déclare Jacques Archambault, directeur général d'Héritage canadien du Québec. Il précise que son administration est le commanditaire des travaux de rénovation actuels. Car la maison originelle est en chantier. Des échaffaudages entourent l'édifice. L'auvent a partiellement été défiguré. Ses poutres et barrières ont disparu. On parle d'une rénovation définie, c'est-à-dire basique, pour ne pas dénaturer la structure originale. Coût total des travaux : 100 000 dollars, dont 20 % sont subventionnés par le ministère de la Culture, de la Communication et de la Condition féminine. « C'est peu de la part du gouvernement. », admet Jacques Archambault, « Le reste provient des levées de fonds et des dons de la population. » L'organisme ne souhaite pas générer de l'argent avec une entrée payante, par exemple : « On agit plutôt comme un service public avec une mission d'intérêt général. Le patrimoine doit rester accessible, notamment aux étudiants en Architecture ou aux professionnels de l'Histoire. » On notera tout de même que les visites sont limitées sur l'année. Il faut prendre rendez-vous pour avoir la chance d'explorer la maison de ferme Hurtubise.

JQM

29 septembre 2012

ENQUÊTE : LOVE SHOPS / ENTRE FINESSE ET SENSUALITÉ

Noël se profile et toujours pas d'idée cadeaux pour votre partenaire ? Les longues soirées d'hiver près de la cheminée pourraient donner quelques idées... Pourquoi ne pas penser à quelque chose de sexy, sophistiqué, esthétique ? Pourquoi ne pas envisager de faire un tour dans un love shop ?

Un « Love shop » ? Qu'es a quo ? Pour faire simple, il s'agit d'une boutique qui propose des produits érotiques. Présentation avec Haïfa, la trentaine, responsable du seul love shop de Louvain-la-Neuve, Côté Coeur : « Vous trouverez dans un love shop des produits sélectionnés de façon très minutieuse. On peut y découvrir des culottes faites à la main, par exemple. On essaie de viser les qualités les meilleures sans oublier nos coups de coeur (colliers, tatouages...). On tente aussi de trouver des jeunes créatrices françaises qui font de belles choses et qu'on ne verraient pas spécialement dans un autre love shop. »Et de l'élégance, on en trouve. Intérieurs rouges et noirs, chics et sobres, sont décorés avec soin. Des bougies roses et foncées viennent orner les étagères de façon subtile. La précaution dans la disposition des huiles de massage, jeux de société sensuels et autres lingeries fines est assez frappante. Une cliente bon chic bon genre, la quarantaine, évolue à son aise dans l'espace tamisé. La musique jazzy de Norah Jones en bruit de fond accentue l'ambiance intime du magasin. « On définit Côté Coeur comme une boutique de délicatesse sensuelle. »

Le sex shop, frère rival
Léger souci pour l'image des love shops... la confusion liée aux sex shops qui reste importante dans les représentations sociales. Autre endroit, autre atmosphère donc, un sex shop au Nord de Bruxelles. Ici, moins de frou-frou, plus de tape à l'oeil. Les néons fluorescents se reflètent dans les menottes et les collections de DVD pornographiques. Des couleurs qui tranchent avec le côté sombre du lieu. Des hommes de tout âge entrent et sortent du magasin appelé
Sensation. A la question de savoir quelles sont les différences entre love et sex shop, Alex, un employé, répond : « Il n'y en a pas, on vend les mêmes accessoires. D'ailleurs, nous avons les mêmes fournisseurs. C'est juste qu'un love shop, les gens vont vouloir y entrer, parce que la vitrine est plus soft. Mais, c'est la même chose. On vend les mêmes articles [...] A l'extérieur, quand je dis que je suis dans un sex shop, je sais que l'image que je donne, c'est le gars qui travaille chez les pervers. » Selon le jeune homme, l'apparition des love shops tient plus du phénomène de mode. « On change un nom. On le rend plus fun. Plus facile à prononcer. »

Concernant l'image globale, les responsables marketing jouent sur la différence et font en sorte que les love shops se démarquent. Leur positionnement se situe aux antipodes de celui d'un sex shop. Comme s'il s'agissait de se débarasser de l'aspect péjoratif dont le marché du sexe souffre. Là où le sex shop connote la perversité, le « magasin de l'amour » surfe lui sur le sensuel-romantique, voire même le luxe.

Le love shop, un commerce nouveau
Le premier magasin du genre en Belgique est récent puiqu'il à ouvert en 1995 à Anvers. En Wallonie, le premier est né en 2005 à Liège.
C'est la pornofication de la société, l'émancipation du plaisir féminin qui pourraient expliquer l'apparition de ces établissements. « D'un côté, on revient à des valeurs de partage, de fidélité. De l'autre, on encourage les femmes à venir parce que leur sexualité ne doit plus être un tabou », explique Haïfa. Le sexe est partout : à chaque coin de rue, dans les médias. Cela a inévitablement servi à sa démocratisation. Les love shops dépoussièrent les moeurs et collent à l'évolution de la société.

D'ailleurs, l'organisation des produits y est étudiée dans le moindre détail. « On met la lingerie au premier plan, puis on passe aux accessoires et aux lubrifiants, et ensuite, dans un coin, on a les rayons fétichisme et vidéo. Une telle disposition évite de choquer les gens. » révèle Sarah, vendeuse néerlandophone dans une des boutiques érotiques Pabo, surtout connue pour ses catalogues de vente par correspondance.

Le côté raffiné se retrouve notamment dans le design des objets. Une idée à laquelle les fournisseurs se rendent compte petit à petit, « ils sont en train de comprendre qu'il faut faire attention à l'esthétique. On a été au salon du sexe de Berlin. On a vu des choses splendides. On essaie d'attirer l'oeil, le visuel est important. Les gens ne cherchent pas du hard mais de la sensualité » déclare Haïfa, gérante de Côté Coeur. Et les publicitaires ont développé le filon. Les plus grands consommateurs sont les femmes. Il semblait alors évident de les toucher aussi en matière de sexe.

Un service client garanti
Pari gagné : l'accessibilité et l'accueil plus chaleureux les attirent davantage. Ce sont également elles qui tiennent ces commerces. Sarah explique, « 
Ici, c’est beaucoup plus facile d'entrer pour les femmes car il y a une femme derrière le comptoir… Quand elles ont des questions, elles demandent plus facilement. » Le conseil, l'écoute sont importants. Haïfa affirme qu'il n'y a aucun jugement de sa part. « Une fois, un homme est venu chercher un petit cadeau pour son épouse et pour sa maîtresse en même temps. Mais on est tenu au secret professionnel. Quand je croise des clients dans la rue, je suis discrète. »

Méfiance toutefois, croire que les femmes sont le coeur de cible est un leurre. « On ne peut pas parler de sex shop au féminin. »C'est avant tout la notion de couple qui prime. L'épanouissement de deux partenaires semble être le crédo numéro un du love shop. « Les couples viennent pour repimenter leur vie amoureuse, acheter une petite lingerie, une petite huile de massage : c'est vraiment pour faire plaisir à l'autre. », dit la responsable de Côté Coeur. « Je suis fière quand un homme en costard cravate après le boulot vient chercher un cadeau pour sa femme. C'est ce que je voulais. »

Discours semblable dans la Boutique Minuit située aux Galeries du Centre à Bruxelles. Ouverte il y a 25 ans avec pour spécialisations la lingerie érotique et le fétichisme, elle est généralement classée dans la catégorie love shop. Véronique, la quarantaine passée, apprêtée et disponible, raconte. « La clientèle est classique ici. Les gens recherchent des choses spécifiques, ils savent ce qu'ils veulent. Ils achètent pour leur conjoint. Certains personnes viennent pour relancer leur couple. Un jour, deux jeunes époux sont venus après l'accouchement de la jeune femme. Ils venaient dans une optique thérapeutique... ». La panoplie de déguisements en latex, en cuir, s'ajoute aux différentes cuissardes entreposées dans le magasin. « On a aussi beaucoup d'hommes et de femmes du monde de la nuit, des jeunes qui cherchent des déguisements pour Halloween ».

Des difficultés pour s'établir
En ce qui concerne l'accord d'ouverture des autorités, il semble qu'il soit moins pénible de défendre un projet love shop qu'un dossier sex shop. Mais les négociations sont longues. Haïfa a dû proposer trois projets à l'Inesu (Institut pour l'embellissement, l'aménagement, l'équipement et la gestion des sites universitaires) de Louvain-la-Neuve. Selon ses propos, les responsables n'étaient pas très enthousiastes à l'idée qu'une boutique dont le fond de commerce est l'érotisme, ouvre ses portes dans la commune. « 
Ca ne marchait pas parce qu'il y avait le mot « sex-toy » du coup on a dû un peu changer les mots, les détourner d'une autre façon, sans employer ces termes. »

Et l'avenir de son magasin, comment le voit-elle ? « Je me déplacerai bien. Mettre la boutique où il y a du passage, la déplacer. On est un peu caché, mais c'est bête, on n'a rien a cacher. Si on avait une plus grande vitrine, on pourrait avoir plus de succès parce qu'il y aurait plus de passage. »

Les fêtes de fin d'année approchent. Peut-être tomberez-vous sur la vitrine d'une boutique de charme. Peut-être y entrerez-vous. Il est temps de se faire plaisir.

JQM

18 septembre 2012

UN CADRE FEUTRÉ POUR LES AMATEURS DE BELLES PHRASES

Rue de la Madeleine, Bruxelles. La Galerie Bortier, une bouquinerie pleine d'histoire, interpelle. Sa vitrine est pourvue d'ouvrages rares et d'exception. La vieille boutique dans laquelle se mêlent livres anciens jaunis par le temps, éditions de poche et magazines de découverte passés ne demande qu'à être sillonnée.

Ce lieu du XIXè siècle, passage mince, allie verre et fonte, finesse et solidité. Un caractère traditionnel qui rappelle le hall d'une gare. Ici, rien de bling-bling, juste de l'authentique. Les échoppes de bouquinistes s'étalent sur deux niveaux. En bas un jeune couple et leur fillette transitent. L'enfant trépigne d'impatience. Ses bottines en fourrure cognent le sol carrelé dans un rythme de plus en plus soutenu. La mère tente de contenir son agacement en se concentrant sur la lecture d'une belle page.

L'odeur environnante du papier évoque celle qui émanait de la bibliothèque de Grand-père, là où se trouvaient les livres de Simenon, les encyclopédies Larousse ou encore les histoires mystérieuses de Pierre Bellemare. La galerie et les écrits ont vu défiler bien des modes et des époques. Des étagères centrales, en bois, et de couleur bordeaux, arrivent à mi-corps des adultes. Elles surchargent la pièce et renforcent l'impression d'étroitesse. Au second niveau un homme d'une soixantaine d'années feuillette un manuscrit de 1926 aux éditions Gallimard, avec délicatesse, comme s'il voulait éviter à tout prix de froisser les pages. Portant un sac à dos volumineux, il empêche involontairement les autres amoureux de littérature de circuler. Les bouquins sont en rang, prêts à être adoptés, ouverts, consultés ou simplement touchés.

L'endroit est propre. Probablement trop. Beau. Peut-être plus qu'assez. Derrière les vitres transversales, on aperçoit des toiles d'artistes ainsi que d'anciennes collections d'essais. Une jeune femme fait son entrée dans la Galerie Bortier. Affublée de grandes lunettes mouches, type années 60, et d'un manteau marron en sky, elle avance d'un pas décidé. Cette grande brune au teint hâlé joue de sa beauté. Fatale. Elle est pressée. Elle se dirige vers un vendeur qui répond à sa requête et repart aussi vite.

Sur le sol, on découvre l'ombre de la verrière dessinée par un rayon de soleil d'hiver. Les individus se succèdent en cet après-midi de février. Les différences de classes sociales sont visibles. Pourtant ces personnes ont un dénominateur commun : leur goût pour les vieilles pages dans un lieu de caractère.

JQM

 

12 avril 2012

HERSTAPPE : C'EST RIQUIQUI, TOUT PETIT !

Sa superficie et sa population font de ce village du sud du Limbourg la plus petite commune du Royaume de Belgique. 83 habitants, quatre rues, une trentaine d'habitations... et un espace social pas si évident à appréhender dans cet endroit où se côtoient néerlandophones et francophones.

Mieux vaut être équipé d'un GPS, ou bien, employer la bonne vieille méthode : demander son chemin aux passants. Herstappe n'est indiqué que par un seul panneau fléché, au tout dernier moment. Entouré de larges champs agricoles, le village se situe sur la N614 à six kilomètres au sud de Tongres. Le silence règne entre un écho aérien et un éventuel chant d'oiseaux. Le temps s'est comme arrêté.
Quand on a la chance de croiser un Herstappien, celui-ci indique spontanément la propriété du bourgmestre, Serge Louwet. « Allez le voir, il habite juste derrière. Vous voyez la bâtisse là ? » Un drapeau noir, jaune, rouge flotte dans le jardin. La maison est typiquement belge avec ses briques de couleur grenat et ses fenêtres en bois. Le bourgmestre ouvre la lourde porte d'entrée de style moyen-âgeux. « Entrez donc ! ». L'homme à la soixantaine rugissante est petit et trapu. Son bureau ? La table de la cuisine... A commune minime correspond une équipe municipale minime, soit deux échevins et quatre conseillers communaux. Ici, on ne parle pas des libéraux, socialistes ou catholiques. Le parti de la majorité s'appelle Herstappe 2000. Il n'est ni de gauche, ni de droite. Les septante votants choisissent plus un programme concret qu'une grande famille politique à idéologie.

Une évolution démographique logique
Le mayeur, qui en est à son troisième mandat, conjugue son activité politique avec l'agriculture, son métier. Une profession prépondérante au sein du patelin. On y compte en effet neuf fermes. Les métiers de la terre représentent la plus grosse part de revenus des habitants. Malgré tout, le secteur agricole recule. « Au grand maximum, il y a eu 138 habitants. Les fermes attiraient les gens pauvres. Ils venaient y travailler et s'y loger. Des gens qui soignaient les animaux, des servantes, et des paysans qui travaillaient dans les champs. Les grands fermiers, seigneurs, ne faisaient que gérer leur ferme. » dit Serge Louwet avec un fort accent flamand. Et puis l'ère de l'industrialisation change la donne. Les ouvriers partent à l'usine. Un moyen pour eux de mieux gagner leur vie. La population commence dès lors à diminuer à partir des années 1950. Lentement mais sûrement.La désertion de la localité provoque la fermeture de l'école communale à la fin des années 1970. Les enfants se rendent dans les écoles des communes voisines.
Actuellement, aucun véritable commerce n'est à recenser. Signalons tout de même le bureau de poste, une permanence étant assurée un jour par semaine seulement. Un poste de police sans agents : « La police est basée à Tongres. Elle ne vient ici que s'il y a un souci. » Et puis, un café, au nom de « 't Tholuyst », (qui signifie « la douane ») est ouvert depuis quatre ans (voir ci-contre). L'église néo-gothique Saint-Jean-Baptiste, quant à elle, interpelle. La porte est verrouillée. Selon une riveraine, il en est ainsi « parce qu'elle a été vandalisée dans le passé. Il faut demander les clés à la femme de ménage pour pouvoir y accéder. » Un mini cimetière à l'anglaise, constitué d'une quarantaine de tombes, vient encercler l'édifice culminant.

Des divergences inattendues
À Herstappe, on se trouve sur le sol flamand, dans le Limbourg, mais à la frontière de la province wallonne de Liège. On y parle aussi bien le néerlandais que le français. Il s'agit d'une commune à facilité linguistique. « Cette particularité explique pourquoi on ne s'est jamais rattaché ou regroupé avec d'autres villages. Les entités voisines sont uniquement néerlandophones. Pas moyen de s'unir. », explique le bourgmestre. En ce sens, Herstappe n'a jamais été absorbée par Tongres, comme les communes de Lauw ou Rutten. Elle est toujours restée indépendante, isolée. Les noms des rues et des panneaux sont inscrits dans les deux langues, comme à Bruxelles. Cela dit, « ici il n'y a pas de querelles linguistiques » plaisante Serge Louwet. Illustration de cette bonne entente communautaire : la messe a lieu un dimanche en néerlandais et le suivant en français, sans poser le moindre souci.
Les problèmes seraient plutôt d'ordre politique. Un habitant souhaitant garder l'anonymat évoque la question. « Herstappe est divisé en deux groupes politiques. Ceux qui sont pour le bourgmestre et ceux qui ne le sont pas nécessairement. Les membres d'une famille votent tous pour le même candidat. Alors quand quelqu'un change d'opinion, c'est d'une certaine manière vu comme une trahison par les autres. Lorsqu'une parole est cassée, elle l'est pour toujours. »
Les relations entre les gens sont équivoques. « Ici, on est comme une grande famille. Il y a toujours des bons et des mauvais moments. S'il y a un mariage, un décès, tout le monde va venir à l'événement. » poursuit-il. Mais qui dit famille ne dit pas obligatoirement « bonne famille ». Comme dans chaque fratrie, des tensions peuvent éclater et des clans se former. Dès qu'un trouble intervient, tout le monde le sait. Vous avez dit bouche à oreille ? « Les mentalités sont plus fermées ici qu'en ville. Dans une petite communauté, on a des principes, des valeurs qu'on doit respecter. »
Pour mettre les brouilles de côté, les locaux ont l'occasion de se réunir au moins une fois par an, l'été, lors de la foire organisée par l'association indépendante « Les Amis de Jean Sans Peur ».

Une stabilité immuable
La commune microscopique a des projets modérés, des ambitions à son niveau. Il faut dire que son budget annuel ne dépasse pas les 60 000 euros. Le chef du village précise, « 
L'idée, c'est de faire le moins de dépenses possible, d'avoir un réseau routier et la maison communale en bon état. Ce sont les seules préoccupations de la commune ; que la gestion se fasse au mieux. On veut avoir les avantages d'une ville. On a une cabine téléphonique publique, on a le gaz de ville ce qui n'est pas le cas partout à Tongres, par exemple... »
Trouver des informations sur ce lieu pas comme les autres relève du parcours du combattant. Il n'existe pas de site internet. Tout au mieux, il est possible de rejoindre le groupe Facebook « Herstappe, commune anarcho-capitaliste » en flamand... Quoi qu'il en soit, investir dans la communication n'est pas une priorité pour les politiques. Les Herstappiens sont à l'aise dans leur milieu paisible et confiné et ne souhaitent pas attirer plus de gens. Le chemin cyclable, inauguré il y a dix ans, avait suffisamment bouleversé la vie locale !

JQM

 

9 novembre 2011

CINQ QUESTIONS A...

Antoine Char. Anciennement journaliste au quotidien Le Jour, à l'Agence France-Presse, il collabore aujourd'hui avec LeDevoir et Métro. Il est également professeur à l'École des médias de l'UQÀM depuis une quinzaine d'années. Antoine Char est spécialisé dans l'information internationale, la presse américaine et l'éthique dans le journalisme. Il a écrit des ouvrages sur les pratiques journalistiques et la communication.

L'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a récemment publié en "une" une caricature de Mahomet. Ce  a entraîné l'incendie des bureaux de la rédaction. Selon vous, s'agit-il d'une provocation des journalistes ou de la simple liberté d'expression ?

Parfois il faut provoquer pour donner un peu plus de tonus à la liberté d'expression. Provoquer dans un but particulier. Parce que la liberté d'expression, comme la démocratie, comme toute liberté, s'exprime en temps de crise. Et dans cette affaire, à mon avis il y a une crise. Ici, j'emploierais les termes de Samuel Huntington, qui parle d'une « crise civilisationnelle », « une crise entre les cultures ».
Il reste que dans les sociétés occidentales que nous connaissons, dans lesquelles nous vivons, il existe une religion qui est la liberté d'expression. Elle est imparfaite. Il faut tous les jours se battre pour elle. Et il faut parfois ce genre de crise pour exprimer sa foi en cette « religion ».
À mon avis, ce n'est pas seulement une question de caricature, d'une religion en particulier. C'est surtout exprimer une chose fermement en dépit des conséquences qu'il peut y avoir.

Pensez-vous que les journalistes devraient revoir leur code de déontologie et s'imposer des limites vis à vis des sujets délicats, tels que la religion ?

Selon moi, quel que soit le sujet, il faut que les codes de déontologie des journalistes soient revus pratiquement tous les jours. Mais ce n'est ni évident, ni facile de remettre les choses en question. Il y a deux visions d'éthique. On parle d'éthique de la conviction et d'éthique de la responsabilité. La première est plus engagée. Le journaliste se met au service d'un principe avec le sentiment que le devoir s'impose à lui, peu importent les conséquences. La deuxième implique que le journaliste est plus soucieux des répercussions. Il prévoit les conséquences désirables et indésirables de son action. Finalement, on est toujours partagés entre les deux. On est balloté. Parfois on va plus vers une direction, parfois vers une autre direction. Il faut faire attention car chaque cas est un cas spécial.

Alors faut-il pérenniser l'existence de Charlie Hebdo ?

Charlie Hebdo est un animal assez spécial dans le paysage médiatique français, même dans le paysage médiatique occidental. Je pense qu'il faudrait des journaux satiriques comme Charlie Hebdo dans chaque culture. Et cela avec tous les travers de l'hebdomadaire. C'est-à-dire que, de par son traitement plus espacé de l'actualité, il peut consacrer davantage de temps aux sujets d'enquête, aux dossiers sur des thèmes spécialisés, au journalisme d'investigation. Charlie Hebdo s'autorise le droit de blasphémer, il ne plie devant rien. Il n'a aucun tabou. S'il n'y a pas de Charlie Hebdo, il n'y a pas de poil à gratter et on va dans le lisse.
Et puis, au-delà de la religion, il s'attaque aux idées des hommes politiques tant de gauche que de droite, d'ailleurs.

En parlant de politique justement, on a vu le rôle des médias sociaux lors des dernières élections fédérales au Canada. La liste des thèmes abordés était plus vaste sur internet notamment. Mais ne croyez-vous pas que ce phénomène d'e-campagne peut conduire à une quelconque dérive ?

Quand on est tous au fourneau, on risque tous de se brûler les doigts. On peut regretter certains gestes, certaines interventions. Mais c'est bien d'être à la cuisine et de concocter chacun un petit plat en vue d'un festin démocratique électoral. Les médias sociaux se greffent de plus en plus dans le débat démocratique, sociétal, dans les élections, dans les campagnes électorales... Pourquoi pas ? Après tout, les dirigeants se servent de plus en plus de leurs médias sociaux pour annoncer toute sorte de choses et justement contourner ce qu'ils estiment être une espèce de Mur de Berlin, tenu par les médias de masse, traditionnels. Alors, moi je n'y vois rien de dangereux.
Cependant, plus il y a de voix et plus il peut y avoir de dérives. C'est au journaliste -dit professionnel- de canaliser un maximum de voix, d'en déchiffrer certaines, de simplifier des messages, d'apporter une certaine complexité quand il en faut, mais de toute façon on peut tout tiquer. C'est évident. La boîte est grande ouverte et tout sort de ce paquet surprise. Le meilleur comme le pire.

Le média social est-il un nouveau moyen de sensibiliser les jeunes à la politique ?

Les jeunes grandissent avec ce nouveau vecteur de communication. Alors ils sont automatiquement sensibilisés, ils grandissent, ils se nourrissent avec.
Pourtant, politiquement, je dirais que ce ne sont pas les nouvelles technologies qui éduquent, c'est tout un système d'éducation. S'il n'y a pas un terreau fertile à éduquer les gens, ils ne vont pas s'instruire, qu'ils aient affaire aux médias sociaux, aux nouvelles technologies ou à un nouveau miracle. Il faut une certaine rigueur dans l'éducation... Prenons l'exemple de l'université. Si le professeur donne des bonnes notes à tout le monde pour avoir la paix et être aimé de la part des étudiants, l'étudiant avance mais il n'a pas les vraies balises qui lui permettront de mieux comprendre la société dans laquelle il vit. Alors, médias sociaux ou pas, je pense que c'est au départ le système d'éducation qui est le véritable ferment de cette question. Le reste, ce sont des artifices.

JQM

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